samedi 10 octobre 2015

Le fils de Saul

 Sentiments retrouvés


Récompensé à Cannes par le Grand prix du jury, Le fils de Saul est un film hongrois de 2015 réalisé par László Nemes. Ce film s'est fait remarquer par le sujet très dur qu'il aborde mais surtout par la mise en scène qu'il utilise pour traiter ce thème.

Le film s'ouvre sur un long plan-séquence où on voit Saul travailler dans un four crématoire. Ses gestes sont mécaniques, son regard vide d'émotions. Soudain on entend une respiration, quelqu'un qui tousse ; Saul se retourne. A cet instant précis, l'automatisme qui le caractérisait jusqu'à présent s'éteint pour laisser place à l'humain : la machine meurt et l'âme de Saul ressuscite. Le flou d'arrière-plan et le format carré nous permettent de nous concentrer sur ses sentiments que l'on voit enfin. Le titre du film prend tout son sens et Saul part à la recherche d'un rabbin afin d'offrir à son fils (ou, du moins, celui qu'il considère comme son fils) une sépulture conforme à sa religion. L'intrigue évolue dans un suspens de plus en plus haletant et selon le point de vue de Saul qui s'acharne dans son combat, avec en fond celui des autres prisonniers qui luttent afin de sortir vivants de cet enfer. Les coups de feu, les cris, les pas affolés sur le sol... On entend tout mais on ne voit quasiment rien : le hors-champ a ici une puissance considérable. Dès les premières minutes, une forte tension nous prend aux tripes sans jamais nous lâcher et on entre dans une atmosphère aux couleurs froides et sombres. En optant pour une mise en scène réaliste, László Nemes maîtrise nos émotions tout au long du film, alternant entre espoir et désespoir, jusqu'à une fin représentant l'un de ces deux sentiments. Cependant, Le fils de Saul n'est pas un film montrant l'horreur de la Shoah qui reste dans le flou d'arrière-plan, c'est avant tout un film sur un Sonderkommando qui s'accroche à la part d'humanité qui lui reste. C'est un sujet délicat qu'aborde ici László Nemes ; mais avec sa caméra, et son scénario prenant, il a su le manier avec justesse.

Ainsi, après 5 ans de travail, c'est un pari réussi pour László Nemes qui a su conquérir le jury cannois tout comme celui de War On Screen puisqu'il a remporté le prix de la mise en scène avec ce film à la fois poignant et cruel. Le fils de Saul est d'autant plus remarquable qu'il s'agit du premier long-métrage de László Nemes qui a enchaîné les choix audacieux tels qu'une faible profondeur de champ et un format carré. Espérons que son talent de réalisateur se confirmera dans son second long-métrage.


Nina Logote et Marion Pourrier, 1L2.

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