mardi 24 juin 2014

En feuilletant les journaux de bord

Dans ses yeux, un film de Juan José Campanella (2010)


1999, Argentine. Benjamin Esposito, un enquêteur tout juste à la retraite décide d’écrire un roman d’après une affaire classée dont il a été acteur, et qui l’obsède depuis près de 25 ans : le viol et le meurtre extrêmement violent d’une jeune femme. Il retourne alors dans la ville qu’il a quitté 25 ans plus tôt, à cause de ce douloureux épisode de sa carrière, Buenos Aires. Mais ce travail d’écriture le ramène à la femme qu’il n’a jamais cessé d’aimer.

Esposito replonge alors dans la sombre période de l’Argentine de 1974, où l’ambiance était étouffante, et les apparences trompeuses…

Un drame choquant, un récit policier passionnant !

Dans ses yeux est une histoire complexe avec plusieurs niveaux de narration. En effet le cinéaste mêle les fils de l’intrigue et joue avec les souvenirs du temps passé. Comme dans un film noir classique, l’ambiance est très importante, mais les éléments politiques, romanesques et oniriques ajoutés renouvellent le genre… pas besoin de femme fatale ! les personnages et leur évolution sont mis en avant : l’enquête criminelle, le dysfonctionnement du système judiciaire argentin et la situation politique du pays restent secondaires. Esposito et son amour pour Irène, l’amitié qui le lie avec son collègue alcoolique : les relations humaines sont filmées avec brio, et même sublimées avec une mise en scène belle et élégante. Les personnages sont magnifiques et intenses. Certaines scènes vous marquent profondément : bien qu’elles soient les plus tristes, elles sont les plus recherchées et, paradoxalement, les plus belles : la découverte du corps pourrait être un tableau, le départ du train subtilement filmé est émouvant, l’explication des photos retournées bouleversante.

« Comment avez-vous pu pardonner ? »

Dans ses yeux est un film sur les choix de la vie, l’amour, les regrets, mais également sur la justice, l’obsession et la vengeance.

La scène finale est un véritable choc. Presque sans dialogue, elle nous pose de nombreuses questions grâce à la mise en scène, aux angles, aux plans. Gomez, le mari de la victime, a réalisé sa propre justice : le meurtrier est derrière les barreaux. Seulement, en l’enfermant dans sa propre maison, il s’enchaîne à lui : Gomez est lui aussi prisonnier du passé qui le ronge, de ses souvenirs, de son secret, du silence. Comme l’assassin, il est filmé derrière les barreaux, mais d’une prison immatérielle et morale.

Dans ses yeux est riche et émouvant. Un film à l’impact durable, qui a out d’un très grand film !

Dans ses yeux, un film qui vous en mettra plein la vue !

Gabrielle Sosson

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