Dès
le premier plan, un plan d'ensemble, nous sommes tout de suite
plongés dans l'univers sombre et solitaire du Samouraï, Jeff
Costello, interprété par Alain Delon. Ce dernier est à peine
perceptible dans cette grande pièce qui n'est autre que sa chambre,
aussi froide et renfermée que lui. Elle apparaît presque carcérale
et grisâtre, comme son imperméable et son chapeau, reflétant bien
sa personnalité. Il est allongé dans son lit en fumant et paraît
petit face à la grandeur de la pièce. D'ailleurs, Jean-Pierre
Melville à demandé à son décorateur d'exagérer la hauteur de la
pièce car il voulait vraiment donner un effet d'immensité. On ne le
distingue presque pas, comme dans son métier, il est invisible même
dans son intimité. Il se fond dans le décor. On ne perçoit que la
fumée qui s'échappe de sa bouche, il est silencieux et pensif. La
caméra est placée au milieu du « quatrième mur », ne
bouge pas et reste fixe pour le moment, ce qui crée une atmosphère
lourde et pesante. De plus, la pièce est à peine éclairée malgré
la lumière qui traverse les fenêtres. Le silence règne, seuls
l'oiseau placé au milieu de l'espace et la pluie battante brisent ce
calme perturbant et cette atmosphère glaciale. L'oiseau apparaît
comme la seule présence vivante de la chambre et la pluie renforce
l'esprit triste et morbide de ce début de film. De plus, on entend
légèrement le brouhaha de la ville de Paris, malgré cela, Costello
n'est absolument pas perturbé et reste dans son monde, ce qui
accentue le caractère solitaire du personnage.
« Il
n'y a pas de plus profonde solitude que celle d'un Samouraï si ce
n'est celle d'un tigre dans la jungle… peut-être... » :
cette citation est censée être extraite du Bushido,
le livre des samouraï, mais a été en réalité inventée par le
réalisateur. Elle est présente lors des premières minutes du film
et annonce la fin du plan fixe d'ouverture.
Puis
pendant quelques secondes, une musique angoissante brise le silence
et la caméra se met à bouger de façon brusque et abstraite, avec
des effets de légers grossissements. L'ambiance change et paraît
encore plus pesante que précédemment. Puis le plan d'ensemble
revient et le Samouraï bouge enfin. Il se lève et le plan change
d'objectif, on voit un gros plan sur des billets déchirés qu'il
tient dans la main. C'est alors qu'on aperçoit le personnage
principal de plus près et plus clairement, la lumière est beaucoup
plus forte que dans le premier plan. Un gros plan est ensuite fait
sur la cage et l'oiseau, qu'on peut comparer aux premières minutes
du film quand Costello semble ''enfermé'' dans cette grande
chambre.
C'est
à ce moment que le personnage se déplace enfin dans la pièce. Il
fait d'ailleurs un mouvement qu'on ne relève pas au premier abord
mais qui pourtant semble anodin et sans intérêt pour un homme qui a
pour habitude de toujours contrôler ses faits et gestes : il
frotte ses billets contre la cage.
La
caméra le suit alors dans son déplacement avec un plan rapproché
taille, il cache son argent et se dirige vers la porte. S'ensuit un
plan poitrine où on le voit dans un miroir, il met son imperméable
et son fedora avec des gestes précis et calculés. Son visage paraît
fermé et sans émotions. Il sort alors de son appartement de façon
déterminée et se lance dans l'action du film.
Mathéo
BOVAY et Juliette PHILIPPE
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