WAR ON SCREEN
La guerre et sa représentation dans le jeu vidéo
Surprise ! Dans la première édition du festival War on screen, on a laissé sa place au jeu vidéo, lors d'une table ronde, une discussion de deux heures environ. Il est triste de voir que le sujet n'avait pas déplacé plus d'une vingtaine de personnes. Mais passons, le sujet était captivant, avec une bonne diversité dans les invités :
- un cinéaste, Jean-Marie Nizan
- un game designer, Stéphan Hernandez
- un lead designer en serious game, Olivier Mauco
- un responsable du développement de la simulation, état-major de l'Armée de Terre, le Colonel Philippe Dutroncy
- et le rédacteur en chef de Canard PC, le bimensuel national sur le jeu vidéo, Ivan Gaudé, pour présenter le tout.
On commence fort avec l'origine du jeu vidéo de guerre : le cinéma de guerre avec le film Il faut sauver le soldat Ryan (1998) de Steven Spielberg, adapté en jeu vidéo par la décision de ce dernier : Medal of Honnor en 2002. Le jeu offre des passages narratifs très similaires du cinéma, marque du 7ème Art qui est encore visible dans les jeux vidéos aujourd'hui.
Se pose donc la question : est-ce que le jeu vidéo de guerre a le même but que le cinéma de guerre, à savoir la pédagogie ?
Oui, dans une certaine mesure, car le jeu vidéo permet au joueur de s'immerger dans la guerre, dans la frénésie pour les jeux les plus connus (Battlefield, Call of duty...), soit pour comprendre les mécanismes d'une bataille dans les jeux de stratégie, soit pour comprendre les causes d'un échec ou les conséquences d'une guerre qu'on aurait frôlée dans un univers hypothétique.
Ainsi, non, le jeu vidéo n'est pas qu'un défouloir géant qui rend violent, comme certains s'efforcent de le démontrer. En effet le jeu vidéo ne reproduit pas exactement les contraintes de la guerre et ne peut former des soldats de choc, ce à quoi la simulation elle-même ne peut prétendre. En effet, comme le Colonel Philippe Dutroncy nous l'explique, la simulation ne sert pas à la formation, mais à l'entraînement, à la prévision d'un événement et à l'apprentissage du commandement (en résumé). Ainsi ce qui relie les simulations au jeu vidéo, ce sont les moyens utilisés et développés par l'un ou l'autre et le serious game. Le serious game est une extension du jeu vidéo qui n'aspire pas principalement au divertissement, mais, ici, à la pédagogie, à l'information et à la stratégie. Il est au jeu vidéo ce que le documentaire est au cinéma. Le serious game est parfois détourné en simulation, comme pour le jeu Arma, dont seul le moteur graphique (le programme qui génère le visuel du jeu) est extrait pour être réutilisé.
Revenons au jeu vidéo de guerre en général : montre-t-il un point de vue imposé sur le guerre?
La première réponse qui apparaît, c'est que le jeu vidéo est neutre, en permettant parfois d'incarner deux camps différents dans notre histoire contemporaine .Mais réflexion faite, le jeu vidéo commercialisé en France n'offre que deux points de vue : soit celui du camp occidental, soit un point de vue neutre. Ainsi on cite l'exemple d'un jeu traitant des conflits en Israël du point de vue palestinien, avec une armée américaine montrée comme tyrannique. La réflexion s'élargit ensuite aux jeux auxquels le public français peut avoir accès, dont les origines sont européennes, américaines ou japonaises.
Montre-t-on dans le jeu vidéo de guerre les conséquences du conflit ? En effet, dans les jeux vidéos les plus importants, les combats ont lieu sur des champs de bataille déserts, que ce soit dans les villes ou non, et les corps des ennemis disparaissent au bout de quelques secondes; Mais c'est sous-estimer le jeu vidéo que de le mettre au rang d'industrie à succès. En effet le jeu vidéo s'illustre souvent là où il n'est pas un succès commercial international.
Certains jeux de guerre mettent les joueurs en face de leurs choix et de leurs actions. Par exemple, après un bombardement au phosphore, un jeu s'attache à montrer les civils qu'il a exterminés "accidentellement". Paper Please montre au douanier qu'incarne le joueur, au service d'un pays totalitaire, les attentats ou les conséquences civiles de la fermeture des frontières lors de tensions entre plusieurs pays, et les problèmes éthiques que cela pose de refuser l'hospitalité à une famille...
Les civils justement... Ils n'apparaissent presque jamais dans le jeu vidéo de guerre. Pourquoi? Soit les contraintes techniques sont trop fortes, car générer et gérer une foule est difficile, soit on veut montrer une "guerre propre", celle d'un jeu justement. Dans le domaine de la simulation, seules les contraintes techniques empêchent l'apparition de ce facteur important. C'est pourquoi les simulateurs ne sont pas des outils précis sur lesquels on pourrait uniquement se reposer.
En conclusion, le jeu vidéo de guerre ne correspond pas au cliché du jeu vidéo bête et violent, ni à celui du succès commercial issu d'une industrie. Il correspond en beaucoup de points au cinéma de guerre, à la fois dans ses procédés narratifs et dans l'évolution de son image, du film de pure violence (en apparence) au film soulevant des questions sur la guerre.
Patrice Ménard
Revenons au jeu vidéo de guerre en général : montre-t-il un point de vue imposé sur le guerre?
La première réponse qui apparaît, c'est que le jeu vidéo est neutre, en permettant parfois d'incarner deux camps différents dans notre histoire contemporaine .Mais réflexion faite, le jeu vidéo commercialisé en France n'offre que deux points de vue : soit celui du camp occidental, soit un point de vue neutre. Ainsi on cite l'exemple d'un jeu traitant des conflits en Israël du point de vue palestinien, avec une armée américaine montrée comme tyrannique. La réflexion s'élargit ensuite aux jeux auxquels le public français peut avoir accès, dont les origines sont européennes, américaines ou japonaises.
Montre-t-on dans le jeu vidéo de guerre les conséquences du conflit ? En effet, dans les jeux vidéos les plus importants, les combats ont lieu sur des champs de bataille déserts, que ce soit dans les villes ou non, et les corps des ennemis disparaissent au bout de quelques secondes; Mais c'est sous-estimer le jeu vidéo que de le mettre au rang d'industrie à succès. En effet le jeu vidéo s'illustre souvent là où il n'est pas un succès commercial international.
Certains jeux de guerre mettent les joueurs en face de leurs choix et de leurs actions. Par exemple, après un bombardement au phosphore, un jeu s'attache à montrer les civils qu'il a exterminés "accidentellement". Paper Please montre au douanier qu'incarne le joueur, au service d'un pays totalitaire, les attentats ou les conséquences civiles de la fermeture des frontières lors de tensions entre plusieurs pays, et les problèmes éthiques que cela pose de refuser l'hospitalité à une famille...
Les civils justement... Ils n'apparaissent presque jamais dans le jeu vidéo de guerre. Pourquoi? Soit les contraintes techniques sont trop fortes, car générer et gérer une foule est difficile, soit on veut montrer une "guerre propre", celle d'un jeu justement. Dans le domaine de la simulation, seules les contraintes techniques empêchent l'apparition de ce facteur important. C'est pourquoi les simulateurs ne sont pas des outils précis sur lesquels on pourrait uniquement se reposer.
En conclusion, le jeu vidéo de guerre ne correspond pas au cliché du jeu vidéo bête et violent, ni à celui du succès commercial issu d'une industrie. Il correspond en beaucoup de points au cinéma de guerre, à la fois dans ses procédés narratifs et dans l'évolution de son image, du film de pure violence (en apparence) au film soulevant des questions sur la guerre.
Patrice Ménard
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