dimanche 13 octobre 2013


La Grande Illusion

En 1916, lors de la Première guerre mondiale, la capture du lieutenant Maréchal et du capitaine de Boeldieu, par l'armée allemande, amène les deux hommes dans un camp de prisonniers.  Rapidement, un fort sentiment de camaraderie se noue entre eux et leurs compagnons de cellule, notamment avec le Juif Rosenthal, avec lequel ils projettent de s’enfuir . Mais à la veille de leur évasion, les détenus sont  emmenés dans une forteresse de haute sécurité dirigée par von Rauffenstein.  Une amitié surprenante se crée entre l'Allemand et le Français de Boeldieu, deux aristocrates que seule la nationalité oppose. Une nouvelle évasion se planifie, dans laquelle seuls deux prisonniers pourront s'échapper pendant que d'autres risqueront leur vie ...

D’abord récit de prison comprenant de nombreux personnages, le film se rapproche et se resserre, tel un lent travelling, sur quelques individus emblématiques. C’est à la fois un récit d’évasion palpitant et une aventure humaine.

A la veille de la deuxième Guerre Mondiale, Renoir nous présente un univers où coexistent différents mondes, différentes nations, aux différentes cultures, dans lesquels les hommes s'entendent et vivent ensemble. Un univers humaniste où l'on « peut faire la guerre poliment » Dans ce film, Renoir exprime sa foi en l'homme, en chaque individu. C’est la société seule, qui pousse les hommes à s’affronter et à se haïr.

La Grande Illusion aborde le thème de la guerre avec une philosophie humaniste et pacifiste. Présente avec le thème, sa dure réalité n'est pas vue par le spectateur. Renoir a choisi de nous faire entendre la guerre par les dialogues, les sons et la musique la mettant sans cesse en valeur.

La Grande Illusion, un film à voir et à entendre !

De la chanson militaire au chant partisan, en passant par l’hymne national, c’est autour de chants emblématiques que se rassemblent d’abord les troupes, les peuples. Le film est émaillé de ces chants qui rappellent en arrière-plan la présence de la guerre.

Moment poignant, lorsque les soldats français et leurs alliés britanniques chantent la Marseillaise, au milieu de la pièce de théâtre de leur camp ! Le décalage entre le lieu et la solennité du chant renforce l’expression du patriotisme dans la scène.

La chanson est aussi un élément essentiel de la présentation des personnages, de leurs goûts, de leur éducation : musique populaire pour Maréchal, valse de Strauss pour les aristocrates . Si les deux univers sont d’abord confrontés et mis en parallèle, ils ne cesseront ensuite de se croiser et apporteront, de la même façon que les images, des éléments narratifs.

La musique est également associée au thème de l'évasion. Les deux exemples les plus démonstratifs sont ceux où Maréchal se retrouve au cachot après avoir chanté la Marseillaise, et l’autre lors de l'évasion dans le camp d’Alsheim. Dans le premier, Maréchal se voit offrir un harmonica par son geôlier, pour apaiser son angoisse d’être enfermé. Cet harmonica devient un instrument d’évasion, non pas à proprement parler mais bien comme une échappatoire à l’isolement et à l’enfermement.

Dans le deuxième exemple, la musique devient un instrument d’évasion. En effet, tous les prisonniers s'unissent pour jouer, à la flûte, l'air “Il était un petit navire”, accaparant alors l'attention des soldats allemands et permettant la fuite de deux d'entre eux.

Ainsi La Grande Illusion est une œuvre cinématographique mais aussi musicale. Sa bande sonore augmente le pouvoir narratif, elle oscille entre complémentarité et indépendance. L’interaction est indéniable, le son trouve sa justification. Le cinéma s’approprie et se munit, avec l’arrivée du parlant, d’une valeur supplémentaire qui participe de sa dimension artistique.


Un des plus grands chefs d’œuvre du cinéma français aux dialogues et aux interprètes inoubliables. Un drame poignant et un chant d’amour à l’humanité et la fraternité.

Gabrielle Sosson

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