La
dernière fois que nous nous sommes vus, je n'avais que sept ans.Tu
étais venue me chercher à l'aéroport pour l'enterrement de
grand-père, malgré le fait que je ne le connaissais pas et toi
aussi d'ailleurs je ne te connaissais pas. Je me sentais comme face à
une inconnue, vide d'émotions. Tu me parlais mais je ne te répondais
pas, à vrai dire aucun mot ne me venait. Ça a été très
difficile pour moi de revenir en Chine, à mes racines, à mon pays
natal. Je n'étais qu'un enfant.
C''était
il y a déjà onze ans...
J'ai
maintenant dix-huit ans et je me sens enfin prêt à t'écrire et à mettre
des mots sur cette souffrance qui me poursuit depuis onze ans. Durant
toutes ces années, j'ai essayé de t'oublier, d'oublier cette mère
qui n'a jamais été là pour me relever, l'image d'une mère qui n'a
jamais été là pour me rassurer. Tu ne t'es jamais battue pour moi,
pour m'avoir auprès de toi et ça je ne peux que t'en vouloir. Papa
était présent physiquement, mais en revanche il n'a jamais été là pour
moi tout comme toi. Lui et moi ne pouvons pas communiquer clairement car nous ne parlons pas la même langue.
A
l'école, lorsqu'on me questionnait à ton sujet, je me contentais de dire
que je n'avais pas de mère et que je n'étais qu'un «
bébé-éprouvette ». J'ai beaucoup souffert de cette situation et
de ton absence mais je n'ai jamais eu le courage de te le dire
jusqu’à aujourd'hui. Il a fallu attendre onze ans pour enfin me
sentir prêt à te voir et à apprendre à connaître cette femme qui
est ma mère. Même si tu n'as jamais été là, que je le veuille ou
non tu es et restera toujours ma mère.
Je
me suis beaucoup attaché à une femme qui était mon professeur, elle
avait quasiment ton âge, j'ai trouvé en elle ce que j'ai toujours
cherché. Elle m'a apporté ce qui m'a constamment manqué, c'est-à-dire l'amour d'une femme. Je pensais l'aimer mais je me suis rendu
compte que, ce que je voulais réellement, c'était ce fameux amour
maternel que je n'avais jamais eu. Je m'en suis rendu compte
lorsque nous sommes partis acheter des billets d'avion et que la
conseillère nous a pris pour une mère et son fils. A cet instant, j'ai su
qu'en vérité, ce que j'avais toujours cherché, c'était toi.
Dire
que ne me suis jamais senti bien à tes côtés serait un mensonge.
Juste une fois dans ma vie, j'ai eu l'impression de partager un
moment avec ma mère. C'était dans le train lorsque nous écoutions
une chanson ensemble, et que tu m'as donné les clés de notre
maison. Tu t'en souviens ? A cet instant j'ai senti mon cœur
s’emballer, pour une fois je me suis senti aimé. C'est à ce
moment-là que je me suis senti comme chez moi.
C'est
vrai que je n'ai jamais voulu me l'avouer, mais tu m'as toujours
manqué.
Je
pense que c'est enfin le bon moment de revenir à la maison, je veux
qu'on apprenne à se connaître. Prépare-nous ces savoureux raviolis
que tu avais l'habitude me faire quand j'étais petit.
A
très vite.
Marine Colmart et Amel Cherit
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