Entrée aux studios
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https://studiosdelavictorine.fr/
C’est en 1895
que le cinéma fit
son apparition, bouleversant les métiers de l’art. Parmi tous les
chefs-d’œuvre historiques que nous a laissés le XXème siècle, nous pouvons mentionner un des films les plus célèbres,
La Nuit américaine
de François Truffaut sorti
en 1973. Ce film dont
le réalisateur est
aussi un acteur nous dévoile le tournage d’un film qui n’est pas
chose simple puisque de nombreux drames relationnels entre les
différents acteurs entravent
le tournage. C’est
dans les studios de la Victorine situés à Nice, 16 avenue Edouard
Grinda, que presque toutes
les scènes de ce bijou
du cinéma ont été tournées,
et ce sont ces studios qui ont inspiré François Truffaut. Nous
allons donc parcourir leur
histoire mouvementée
en deux parties ; nous relaterons dans un premier temps leur
mise en place longue, douteuse et difficile, puis dans un second
temps leur âge d’or jusqu’à leur effacement progressif du monde
du cinéma.
Pour
suivre l’histoire des studios de la Victorine nous devons remonter
en l’an 1919 où deux producteurs à fortes ambitions, Louis Nalpas
et Serge Sandberg, rachetèrent la propriété horticole d’un homme
qui fut très aisé, Victor Masséna, à son fils. Cette propriété
se prénommait « La Victorine » en hommage à
sa
nièce Victoire. Ces lieux étaient déjà immenses avec une
superficie de 7 hectares. C’est après le succès du premier film
qui y fut tourné que Nalpas et Sandberg décidèrent de faire de ce
lieu la capitale européenne du cinéma. Ils mirent immédiatement
leur énergie
physique et financière dans la rénovation des terrasses, la
construction de quatre studios avec bureaux, d’ateliers, de
laboratoires et du bâtiment de la centrale électrique.
Malheureusement
ces projets de construction furent
peut-être trop brutaux
puisque c’est après le tournage en 1920 du film Tristan
et Yseult
que des
problèmes financiers commencèrent
à
se faire ressentir. Ces travaux engloutirent
en
effet les
capitaux rapportés par la production du film. De
grands
acteurs tels
que Cimiez,
Louis Delluc, Germaine
Dulac, Jean
Durand, Henri
Fescourt, Marcel
Lévesque
et Gaston
Modot
quittent la Victorine pour retourner travailler à Paris. De moins en
moins de réalisateurs
et d’acteurs sont intéressé par les studios de la Victorine,
l’équipement devient dépassé, il survient des problèmes
électriques et les bâtiments restent
vides faute de financement.
L’année
suivante Louis Nalpas perd
espoir
et laisse
ces studios à son ami Serge Sandberg. Ce dernier essaya de changer
les choses du mieux qu’il pouvait. La Stoll-Films de Londres vint
même réaliser
quelques
films et René Navarre fit de même mais ne resta pas longtemps ;
ses films furent des échecs. En début d’année 1923 les derniers
espoirs de Sandberg disparurent et il finit par vendre à un prix
excessivement bas les studios à la nouvelle société de production
de Denis Ricaud, ancien administrateur de Pathé-consortium. Les
studios connurent presque une
année
d’inactivité avant de réaliser le film La Nuit du vendredi 13
de Gennaro Dini. L’année suivante
fut tourné le
film Catherine
d’Albert
Dieudonné et Jean Renoir. Pourtant, Ricaud finit par vendre à son
tour les studios en août
1924 à la Société des Films Legrand qui s’empressa de lancer des
travaux de rénovation. Ils réussirent à tourner les films Des Fleurs sur la mer
et L’Ile
sans amour
d’André Liabel avec dans le rôle des personnages principaux Reneé
Sylvaire et Elmire Vautier. Le bilan de ces studios était très
mince, soit jamais plus de trois films par an.
L’installation de Rex Ingram à Nice en fin d’année 1924 bouleversa le cinéma français et surtout l’histoire des studios de la Victorine. Ingram fait construire un nouveau studio, des laboratoires supplémentaires équipés des derniers perfectionnements, une piscine de 25 mètres, des ateliers pour la construction des décors avec les machines les plus récentes, fait installer un générateur beaucoup plus performant pour pallier les problèmes d’électricité et s’arrange même avec la ville de Nice pour avoir le courant 24h sur 24. Il renomme les studios « Ciné-Studios Rex Ingram ».
Villa
de Rex Ingram qui logeait à côté des studios,
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L’installation de Rex Ingram à Nice en fin d’année 1924 bouleversa le cinéma français et surtout l’histoire des studios de la Victorine. Ingram fait construire un nouveau studio, des laboratoires supplémentaires équipés des derniers perfectionnements, une piscine de 25 mètres, des ateliers pour la construction des décors avec les machines les plus récentes, fait installer un générateur beaucoup plus performant pour pallier les problèmes d’électricité et s’arrange même avec la ville de Nice pour avoir le courant 24h sur 24. Il renomme les studios « Ciné-Studios Rex Ingram ».
S’ensuit
l’âge d’or de ces studios ; ils attirèrent bon nombre de
grands
réalisateurs
et acteurs et ne produisirent
pas moins de six films en 1926 et sept en 1927. Rex Ingram fut
lui-même un des réalisateurs de cet âge d’or avec Le
Magicien
où l’on retrouve l’actrice Alice Terry. Le
Diable
au cœur de
Marcel L’Herbier vit
aussi le jour tout comme La
Fin
de Monte-Carlo d’Henri
Etiévant. Le célèbre réalisateur britannique Alfred Hitchcock
demeura dans ces studios niçois pour tourner une
des séquences
de son sixième film Le
Passé
ne meurt pas.
Ingram
avait du mal à occuper le poste de directeur des studios et à
réaliser ses films en parallèle et mit donc la Victorine en
location. C’est la maison de production « Franco-Film »,
avec Léonce Perret à sa tête, qui saisit
l’opportunité de devenir diriger les studios. Suite au succès du
film La
Femme
nue de
Perret lui-même, le groupe commanditaire du film décide de fonder
une société de production cinématographique pour exploiter cette
réussite et distribuer les futures réalisations du
réalisateur.
À
la
fin de l’année 1927,
le nombre de film produits se
multiplie : Graham Cutts tourne Confetti, Jean Durand prépare L’Île
d’amour et Gaston
Ravel Madame
Récamier.
Les demandes fusent au point que l’on doit même en refuser. Le
tournage de Tarakanova
de
Raymond Bernard doit
être reporté
à
cause du tournage
en cours des deux grands
chefs-d’œuvre Vénus
de Louis Mercanton et L’Évadé d’Henri
Ménéssier. Shéhérazade
d’Alexandre Volkoff est l’une des plus grandes réalisations de
la Franco-Film qui
fit
appel à plus de 15 000 figurants. Cet âge d’or inspira par
la suite de
nombreux
réalisateurs
fascinés
par le lieu, comme François Truffaut qui vint
y réaliser
son célèbre film
La
Nuit
américaine
beaucoup plus tard.
Vue
extérieure des plateaux 1 et 4,
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Vue de près du
plateaux 4,
L’année
1930
marque
deux changements majeurs pour ces studios : la mise en place du
cinéma parlant mais aussi l’effacement progressif de la maison de
production « Franco-Film » de la tête des studios niçois
et leur
reprise par la Société Aubert qui les
renomme
« Studios Aubert-Franco-Film de la Victorine », nom qui
fut
remplacé par « Studio Rivera » en 2000. Enfin
en 2017, on
reprit
le nom initial et historique de « Studio de la Victorine ».
Depuis les années 2000 les studios sont délaissés par le cinéma.
Le
matériel trop ancien est la cause principale de
cet abandon, mais
aussi le problème du bruit qui se fait davantagesentir avec l’urbanisation puisque ces studios se situent à moins
d’un kilomètre de l’aéroport.
Ainsi
les studios de la Victorine ont eu des débuts très difficiles et
ont été vendus et revendus
maintes et maintes fois, mais ont
aussi connu un âge d’or étincelant qui
inspira plus
d’un réalisateur. Malheureusement, aujourd’hui, les studios
niçois de la Victorine ne sont plus que des fantômes historiques du
cinéma.
Hasna Bensadek, 1ère D