Membre du jury lycéen lors du festival War On Screen 2017 et ayant vécu une expérience particulièrement enrichissante, je vous propose de vous la faire partager!
Mercredi 04/10/2017 :
Trop impatientes pour attendre l’après-midi et commencer à
regarder les films du festival, nous sommes allées avec Emma chercher plus tôt
nos accréditations le mercredi. Nous avions déjà prévu absolument tous les
films à voir, les horaires, les cours loupés… On ne voulait rien rater du
festival, pour nous c’était clair : être jury lycéen, ce n’est pas tous
les jours. A 10h, le premier film s’intitulait ACCROSS THE UNIVERSE et était
projeté à la médiathèque Pompidou. (Le festival est bien imaginé pour la diversité
des salles de projections qui sont bien situées les unes par rapport aux
autres.) Construit autour de 34 chansons de Beatles (groupe que j’adore), qui
retrace l’histoire d’amour d’un jeune couple dans les 60’s. C’était un de mes
préférés du festival, il était coloré et nous amenait dans un autre univers. A
la fin, c’était la course pour manger et arriver à l’heure pour CAHIER AFRICAIN
à la comète, long-métrage de la compétition. Emma et moi n’étions pas dérangées
par tous les déplacements et les petites pauses, on était déjà trop excitées de
regarder des films tous les jours pendant le festival ! C’était un
documentaire suisse sur les exactions commises en République centrafricaine
entre 2002 et 2003, dont nous n’avions jamais entendu parler. Nous en sommes
sorties retournées, par la longueur et les faits relatés, l’ambiance était
différente du film vu précédemment, mais il nous a mises au courant sur ce
qu’il s’était passé et la souffrance des populations. Après un moment de
silence, nous avons débattu de nos impressions devant la comète, sur les bancs.
Nous y étions presque tout le temps, et cela nous permettait de rencontrer des
gens qui passent sur le festival et d’engager la conversation. On se sentait
amenés à le faire, aller vers les gens, la taille du festival le rend plus
convivial et l’agencement des coins de repos était bien pensé. Vers 15h15,
début des choses sérieuses : rendez-vous avec Johanna pour recevoir nos
sacs wos 2017, photos et interviews pour l’Union. On a passé du temps avec l’équipe
de jurés, on a partagé nos impressions du premier jour, on se rapprochait petit
à petit. A 16h, tout ce petit monde est allé voir LOW TIDE, autre long-métrage
de la compétition. Il était filmé de manière extrêmement réaliste, c’était tout
ce que j’ai aimé dans ce long-métrage. Il m’a paru incompréhensible et je ne
l’ai entièrement compris que par la gazette du festival (merci !) qui m’a
apporté un regard neuf sur ce film, mais il n’était clairement pas dans mes
favoris du festival. Vers 18h30 commença la cérémonie d’ouverture ! Ce fut
une longue cérémonie mais qui nous présentait intégralement le festival et les
films projetés, leur intérêt … S’ensuivit l’inauguration d’une exposition au
dernier étage de la comète, dont l’œuvre principale était une fresque superbe.
Sur cette dernière nous pouvions voir les visages de différents personnages
photographiés, les uns à côtés des autres, sans qu’ils soient sur la même
photographie à la base, le tout en noir et blanc. Le regard des soldats était
très bien reproduit, c’est ce qui m’a plu. Après notre coupe de champagne,
l’équipe est partie à la cantine avant la projection du film d’ouverture AU
REVOIR LA HAUT. J’ai vraiment trouvé ce film beau. Les images étaient colorées,
les thématique des masques et des oiseaux étaient touchantes et riches et les
acteurs sont doués : j’en connaissais la plupart, mais j’ai à nouveau
découvert le talent de Nahuel Perez Biscayart. Ce film mêlait habilement humour et
gravité.
J'étais exténuée mais satisfaite !
Jeudi 05/10/2017 :
Après un réveil difficile, Emma et moi étions en forme pour
la projection de WOMEN OF THE WEEPING RIVER à la comète à 10h. Ce film montrait
très bien la réalité des conflits entre chrétiens et musulmans, contenait des
passages très touchants, mais d’autres très longs, trop longs. Nous n’avions
aucun film de prévu avant 15h45, donc nous sommes allées sur les canapés
devant, pour que je fasse mon journal de bord (celui-là même que vous êtes en
train de lire). Nous avons appris à connaître les vigiles ce jour-là, ils étaient
très avenants derrière leurs habits noirs. Après avoir mangé, Emma et moi avons
travaillé, et oui c’est possible, et de la philo qui plus est. Le coin réservé
au bar au sous-sol de la comète était très silencieux, ce qui nous a permis de
nous concentrer assez facilement. LES AILES DU DESIR de Wim Wenders était le
film projeté à 15h45. Je ne regrette pas d’être allée le voir : le
parallèle entre le monde des anges et des hommes, le noir et blanc et les
couleurs, les monologues poétiques sont tant de choses que j’ai aimées. Nous
enchaînions ensuite avec une projection de court-métrage en réalité virtuelle,
première expérience de réalité virtuelle pour moi, je ne tenais pas en place. J’en
suis ressortie impressionnée mais déçue : l’image était trop pixellisée,
cela m’a provoqué un mal de crâne. L’objet du court-métrage était la bombe
atomique et l’action se passait en Australie mais je n’ai pas saisi le but du
court-métrage, qui était trop condensé pour être intelligible. Après une pause
carnet de bord et un passage à la cantine, nous sommes allées avec Emma et
Maxence, un jury du lycée Ozanam, voir le film COLONEL REDL d’Istvan Szabo.
Sous l’empire austro-hongrois, un soldat montant les échelons dans l'armée progressivement
refoule son homosexualité. Les combats intérieurs qu’il avait à mener m’ont
touchée, je le haïssais parfois mais je comprenais ses actes. J’ai beaucoup
apprécié de voir un film « ancien », de voir une manière de tourner
différente. Cette journée était encore plus fatigante que celle d’hier, mais
nous étions euphoriques de vivre ce festival, alors on oubliait la fatigue, je
n’ai jamais dormi pendant une seule projection d'ailleurs!
Vendredi 06/10/2017 :
Ce matin-là nous avions décidé avec Emma de voir un film
d’animation, pour toucher un peu à tout et nous sommes donc allées voir LA
BATAILLE GEANTE DE BOULES DE NEIGE ! L’histoire d’un groupe d’enfants qui
font une guerre de boules de neige, en la prenant beaucoup trop au sérieux. Le
chien, que tous les enfants appréciaient, meurt à la fin d’un énième conflit… ce
passage était le plus triste du festival. C’était une leçon de vie, il y a des
limites à tout et la représentation des rapports de force au sein d’un groupe
d’enfants était bien faite, en plus de mettre en avant la question de l’égalité
hommes/femmes. Suite à cette projection, nous sommes allées boire un café
devant la comète (c’est notre manière d’oublier la fatigue, la somme café +
euphorie), avant de retourner à Bayen pour voir ERA OF DANCE, qu’on attendait
énormément. Ce film (qui était en vérité un documentaire) traitait d’une
nouvelle esthétique musicale à la fin du mur de Berlin et de la guerre froide.
Nous avions envie de savoir comment une sorte de diplomatie secrète s’était
créée pour faire naître la dance et la techno en RDA. Tellement déçues par le
fait que ce soit sous forme de documentaire, nous avons quitté la salle après
les 10 premières minutes… J’avais honte, je n’aime pas faire ça mais dans un
festival de films de guerre, ce que j’apprécie c’est de vivre les conflits par
une histoire, la vivre en parallèle des personnages ou la sentir valable pour
moi aussi. Je ne ressens pas ce sentiment avec des documentaires et c’est
looooong. Les premières images ne m’ont vraiment pas plu, ce qui ne m’a pas
retenu dans la salle. Après avoir mangé, nous avons croisé le jury étudiant qui
était resté dans la salle de projection d’ERA OF DANCE, il paraît qu’il était
génial. Bon, je le saurais pour le coup d’après, qu’il ne faut pas se borner
aux premières impressions, mais je n’ai pas regretté d’avoir quitté la salle.
Nous avons aussi souvent croisé Olivier BROCHE durant le festival, qui était un
des programmateurs des courts-métrages. J’ai aimé la plupart des films qu’il
nous conseillait et ses grands sourires nous faisaient, à Emma et moi, grand
plaisir. Nous l’avons donc croisé avant la première séance de courts-métrages,
nous étions pressées de commencer enfin à faire notre job ! Entre les 7
courts-métrages proposés, j’ai tout de suite eu mes préférences, mais c’était
intéressant de savoir dire pourquoi je n’en avais pas aimé certains et préféré
d’autres. Le temps de prise de notes était extrêmement court, mais cela nous
forçait à synthétiser et à nous concentrer sur chaque projection, pour ne rien
louper. Lors du débriefing, Estelle LARRIVAZ, présidente du jury lycéen, nous a
donné des pistes d’analyse intéressantes sur tous les courts-métrages. J’étais
contente de vivre ces débats, même si nous n’avions pas tous le même avis et
que certains blablataient beaucoup pour pas grand-chose. Ce soir-là nous avons
mangé avec Johanna, la responsable du jury lycéen, j’ai adoré qu’on parle tous
ensembles. Je n’avais pas de projection de prévue je suis donc rentrée chez
moi, j’ai même fait peur à ma mère parce qu’elle n’était pas habituée à ce que
je rentre si tôt !
Samedi 07/10/2017 :
Ce samedi matin, je suis allée avec Maxence voir JEANNE D’ARC
d’Otto PREMINGER. Notre trio était incomplet, Emma ne s’étant effectivement pas
réveillée pour la projection de 10h (ça fatigue de regarder des films toutes la
journée, soyez prêts si vous souhaitez le faire !). J’ai beaucoup apprécié
le fait qu’il soit tourné en noir et blanc, en plus du jeu de Jean SEBERG. Elle
était émouvante, cela la rendait encore plus belle d’incarner une jeanne d’arc
convaincue et habitée par le saint esprit, qui critique l’Eglise de
l’époque : on sentait en elle quelque chose de pur. Après la cantine, le
café, le journal de bord, Johanna nous avait conseillé d’aller voir les
courts-métrages sélectionnés dans la programmation du Poitiers Films Festival,
où sont projetés des courts-métrages réalisés par des étudiants en école de
cinéma. Ce fut une des plus belles expériences du festival. Je découvrais
vraiment la richesse du court-métrage, chacun d’eux passait un message, était
rythmé et parfois un court-métrage en dit plus qu’un film. Pour une après-midi de
courts-métrages, c’en fut une : il s’ensuivit la dernière séance de
projection des courts-métrages de la compétition, séance encore une fois très
riche. Puis vint les délibérations finales. C’était compliqué, très compliqué.
Il a fallu faire des compromis, on est obligé de prendre sur soi et on apprend
des autres. Finalement nous avons fait un choix judicieux en décernant le prix
du meilleur court-métrage à BATTALION TO MY BEAT, qui montre le rêve naïf d’une
jeune algérienne de s’engager dans l’armée pour sauver son pays de
l’occupation, et le prix du jury à TEMOINS, court-métrage qui traite d’une
photographie mal interprétée en Occident sur les combats contre Daesh en Syrie,
qui va avoir des conséquences pour la photographe. Après ces délibérations, on
est tous allés manger, j’ai pris un café pour tenir lors de la projection de
THE BOMB, à 22h. Il a provoqué en moi de l’horreur et de la fascination, devant
cet objet, la bombe nucléaire, ayant le pouvoir de tout détruire.
Dimanche 08/10/2017 :
Ce dernier jour de festival a commencé par un long métrage de
la compétition : WESTERN. Il racontait l’histoire d’Allemands s’installant
en Bulgarie et ayant des difficultés à sympathiser avec les habitants. Le film était très long, mais l’acteur
principal m’a touchée, il tentait de briser les barrières entre les deux
groupes en conflit, maladroitement mais il essayait et il a réussi. A 16h était
prévu THE YELLOW BIRDS, mais à cause d’un problème technique la projection a
été annulée… Plus qu’à attendre la cérémonie de clôture pour enfin évacuer le
stress dû à la prise de parole pour annoncer notre choix, nous petits lycéens,
mais grand jury. Après le café, le journal de bord et des répéts de notre show,
nous avons retrouvé Johanna à 18h pour un dernier débriefing. L’ambiance y
était conviviale, c’était un festival qui s’achevait, on avait tous appris à se
connaître, on allait annoncer les résultats ce soir, on angoissait un peu. La
cérémonie était magique, les prix étaient justement décernés : l’acteur
dans le film WESTERN a obtenu un prix pour son jeu ! On a cartonné pour la
remise des prix, des bons retours sur notre prestation nous sont parvenus après
la cérémonie. La cérémonie était agréable à vivre, en tant que jeunes on ne se
sentait pas à l’écart, au contraire ! Le cocktail de clôture nous a permis
de dire au revoir à Johanna, c’était un beau moment, je n’oublierais pas cette
euphorie que j’ai ressentie pendant le festival. Le film de clôture traitait
d’un sujet trop peu abordé, le génocide arménien. Le problème c’est qu’il avait
les particularités d’un blockbuster : une fin prévisible, des personnages
toujours très beaux et un trio d’acteurs connus… En sortant du film nous étions
dépitées avec Emma et Maxence, WOS c’était fini. Nous avons croisé Paola Caretta,
la coordinatrice générale de la comète, avec qui nous avions déjà brièvement
parlé. On a discuté des courts-métrages, de leur intérêt, des trop longs films,
des blockbusters, etc. et c’était agréable ! Elle nous a encouragés à nous
déplacer à Clermont et à Poitiers pour en regarder et être immergé dans les
festivals de courts-métrages!
En conclusion, tentez cette expérience, je vous souhaite
vraiment de la vivre, on a tout à y gagner.
Aénor
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