Les
élèves de 1L2 et TL2 se sont rendus le 17 mars à la Comète pour
aller voir Les vacances de Monsieur Hulot, un film de Jacques
Tati !
Un
film de 1953 (mais réédité en 1978) qui … dépayse ! En effet
celui-ci est éloigné du type de films qui sortent dans nos salles
depuis quelques années. Si l'on a pour habitude de voir des images
qui défilent vite, en couleur, avec des dialogues vivants, de
l'action et des effets spéciaux à couper le souffle, c'est vers un
paysage de carte postale en noir et blanc et plus tranquille que ce
film nous dirige...ou presque ! C'est sur la plage de
Saint-Marc-sur-Mer
que l'histoire prend place, un décor de vacances : la mer , les
enfants qui jouent, les vieilles cabines blanches rayées de rouge,
des vacanciers paisibles et… Monsieur Hulot, élément
perturbateur du lot ! C'est une comédie burlesque qui mise
principalement sur la dégaine du personnage, ses actions et surtout
ses gaffes … par exemple le moment où il veut faire fuir les
chiens et déclenche de nombreux feux d'artifice qui réveillent les
vacanciers tour à tour, qui allument leurs lumières à chaque
fois dans le même ordre ! Pour accentuer le burlesque et l'absurde
du film Tati use du comique de répétition, que ce soit pour la
musique qui est la même chaque fois qu'elle revient, le bruit de
la porte du restaurant qui s'ouvre et se ferme, le glacier qui remet
sa «pâte», ou le couple de personnes âgées qui se promène
jusqu'au soir. Monsieur Hulot va à l'encontre d'une société
tranquille qui garde (presque) les mêmes habitudes : à la ville
comme à la plage il n'y a pas de folie qui tienne! Ainsi les
vacanciers présents nagent, bronzent et jouent aux cartes dans un
ton «robotique», quand la cloche sonne pour le repas tout le monde
se rue dans l'hôtel, quand c'est l'après-midi c'est l'heure de la
baignade, personne ne bronche,
tout le monde suit ! Et quand Tati utilise le dialogue, celui-ci est
tout aussi étrange et loufoque que la gestuelle .
C'est
pourquoi en regardant ce film on ne peut s'empêcher de faire le
rapprochement avec Eugène Ionesco, écrivain et dramaturge de la
même époque, de deux ans son cadet. Si Ionesco est passé maître
dans l'art de l'absurde à la scène, Tati l'est à l'écran ! Tous
les deux parodient la société et derrière cette parodie comique
se cache une partie de drame. Par exemple le mécanisme des gens
dans Les vacances de Monsieur Hulot peut être
comparé au mécanisme à l'oeuvre dans Rhinocéros, pièce de théâtre
d'Ionesco, dans laquelle les personnages qui se transforment tour à
tour en rhinocéros et suivent le mouvement représentent en réalité la
critique du totalitarisme. On peut aussi penser à la pièce La Cantatrice Chauve, où les Smith, famille typique
anglaise, mangent la même chose tous les soirs, parlent de choses
futiles, d'un Bobby Watson … enfin de plusieurs Bobby Watson, et
des nouvelles du journal : c'est un texte décousu, qui ne fait
pas tellement de sens. Il en est de même pour Tati sauf que
celui-ci insiste encore une fois sur les actions du personnage qui
n'ont parfois aucun sens ! Comme le moment où Monsieur Hulot donne
un coup de pied à un homme et s'enfuit en courant, ou bien quand il s'installe dans sa petite barque et se met à peindre une
chaise .
Enfin
que ce soit chez Ionesco ou Tati, les gags, l'allure de certains
personnages, l'enchaînement peu logique et le non-sens des gestes
ou du dialogue, notamment le fameux syllogisme qui compare Socrate à
un chat dans Rhinocéros, l'indignation de Mr Smith quant à
l'annonce de l'âge des personnes décédées et non celui des
nouveaux-nés dans le journal, mais aussi Monsieur Hulot et sa
voiture en piteux état, ou bien l'homme qui s'exprime dans un
mélange d'anglais et de français (« But croyez-moi... »)
font rire le public de l'époque et sourire le public actuel . En effet
avec l'évolution de la société, le burlesque et l'absurde sont
parfois jugés trop lourds et inadaptés à l'humour de nos jours.
Cependant
comment résister à un film aussi bien pensé, rempli de petit
détails amusants, et esthétiquement très joli ? Monsieur
Hulot qui semble vouloir profiter à fond de ses vacances en
chamboulant les habitudes peut en agacer certains ... mais comme
dirait Ionesco :"Qui est le plus sage ? Celui qui accepte tout ou celui qui a décidé de ne rien accepter? La résignation est-elle une sagesse?"
Nina Logote
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