vendredi 3 avril 2020

Dans la tête d'un paysan

A l'occasion du projet « Lycéens et Apprentis au cinéma », la classe de TL2 a eu la chance de voir Petit Paysan réalisé par Hubert Charuel en 2017. Le film raconte l'histoire de Pierre, un paysan qui possède un troupeau de vaches. Il sollicite sa sœur, vétérinaire, pour obtenir son avis à propos de l'état de santé de l'une de ses vaches car elle semble avoir un comportement étrange et il craint qu'elle souffre du FHD (Fièvre Hémorragique Dorsale, une maladie fictive inventée pour les besoins du film).

Le film se réfère clairement à la crise de la « vache folle » qui a provoqué une véritable psychose dans l'opinion publique, tant la peur de la contagion de l'homme par la consommation de la viande et des produits était forte. La filière bovine a été fortement ébranlée et a énormément souffert de cette crise : le film met l'accent sur le sort des éleveurs confrontés à la catastrophe.

Le réalisateur, Hubert Charuel, a vécu dans le milieu agricole. Il a investi la ferme où il a grandi et l'interprète du vieux paysan est son propre grand-père. Dans ce film, Charuel veut montrer la réalité de la vie d'un agriculteur qui en vient à cacher la maladie de ses vaches pour garder sa seule raison de vivre, son travail.

Le film commence sur le fait qu'une épidémie bovine, née dans le nord de l'Europe, vient de toucher les premières exploitations françaises. Les autorités européennes imposent qu'au premier cas de maladie déclaré, tout le troupeau doit être abattu. Les cas sont rares, mais Pierre en conçoit immédiatement une sorte de terreur. La scène d'ouverture montre un rêve où ses vaches pénètrent dans sa chambre, l'encerclent, jusqu'à occuper tout l'espace. Un climat d'inquiétude s'installe. Pierre entretient un lien particulier avec ses bêtes et tout montre à quel point la pérennité du monde de Pierre ne tient qu'à un fil, en particulier les vidéos postées sur Internet par un Belge dont le troupeau a été contaminé, annonciatrices d'apocalypse, que Pierre regarde chaque nuit. 

Ce qui devait arriver arriva. L'une des vaches est atteinte par la maladie. Pierre refuse de perdre tout son troupeau et décide d'abattre lui-même l'animal. Il la brûle puis l'enterre, et prétendra qu'elle s'est enfuie. C'est la première scène marquante du film. Nous ne pensions pas voir la vache se faire abattre devant nos yeux. Tant de réalisme et de violence à la fois ! Le rapport au morbide est très important, notamment quand il traîne la vache morte, nous voyons tout, les images sont d'un réalisme cru et frappant.

Charuel étant lui- même fils de paysan, aucun détail n'a été oublié, tout y est. Il retranscrit de la meilleure des façons le mal-être paysan, qui se traduit à la fois par une puissante présence au monde et un abandon de la part des pouvoirs publics. On s'instruit tout en étant intrigué, dérouté par les choix de Pierre, dictés par une santé mentale déclinante. On s'amuse aussi, l’interaction entre le héros et sa sœur vétérinaire fonctionnant selon le principe du duo mal assorti.

Ainsi, la classe de TL2 a beaucoup apprécié ce film et beaucoup de larmes ont coulé. C'est un film qui nous a touchés et sensibilisés à la condition agricole.

Lou-Anne Delaby, TL2